11 août 2015

The China Experience – 12/ The Lijiang Experience (Pt.1)

Premier voyage en Chine, septembre-novembre 2002.

Décollage ici.
Expérience précédente : The Long Way South Experience.


07 octobre 2002 – 02 novembre 2002 : The Lijiang Experience, Lijiang (Yunnan).

Lijiang, Yunnan. Je pensais y rester une semaine, j'y passerai presque un mois. Dans une semaine, une certaine Lu m'apprendra que Lijiang est, traditionnellement, la ville où les écrivains chinois viennent terminer leurs romans. C'est précisément ce que je viens faire ici, puisque je consacrerai les deux premières semaines à conclure L'incident Œdipe. Il faut dire qu'il est difficile d'imaginer meilleur endroit pour écrire ! Si la nouvelle ville est à l'image de n'importe quelle métropole chinoise, terne et utilitaire, la vieille ville incarne le fantasme de la Chine ancienne : maisons et ruelles de pierre, petits canaux surplombés de charmants petits ponts, saules pleureurs… Classé au patrimoine mondial de l'humanité, le site est aussi le centre névralgique de la culture naxi (prononcer « nachi »). Culturellement proche des Tibétains, la minorité Naxi a sa propre mythologie, sa propre écriture et sa propre musique (qui influença grandement la musique classique chinoise). C'est une société matriarcale, c'est-à-dire que les biens appartiennent aux femmes, qui sont censées aller d'amant en amant et ont toute autorité sur les enfants qui naissent de ces unions éphémères. La langue naxi elle-même en atteste : la féminisation des mots les transforme en superlatifs. Lijiang grouille bien entendu de touristes, pour la plupart Chinois d'ailleurs. Les rues sont constellées de boutiques qui vendent toutes sortes de babioles, vêtements, cartes postales et bijoux, de petits bars lounge et de restaurants. Tout ceci pourrait dénaturer les lieux mais les choses ont été faites de manière à ce que tout s'intègre parfaitement au cadre. Il n'y a qu'à déambuler ça et là, s'arrêter boire un thé au son de quelque compilation Café Del Mar, se laisser bercer par le bruit de l'eau qui s'écoule, caresser les chiens devant les échoppes… Un peu partout, des boutiquiers jouent inlassablement la même mélodie naxi à l'aide d'une petite flûte (sept ans plus tard, je retrouverai le même type en train de jouer le même air au même endroit, du matin au soir !). Il y a dans les rues cette odeur que je n'ai jamais vraiment retrouvée ailleurs : un mélange d'encens et de mets chinois, un parfum suave qui vous berce au quotidien… Mais en ce premier jour, j'ignore à quel point je tomberai amoureux de Lijiang.

La première journée commence d'ailleurs assez mal. Lors de mon bref (mais mérité) sommeil à la guesthouse, je découvre en rêve que ma chambre est déjà occupée. D'aucun parleront d'un simple cauchemar, je préfèrerai croire que j'ai affaire à un fantôme. Des heures durant je revis le même rêve, encore et encore : je me réveille et me lève, lorsqu'un être livide se jette sur moi. Il est blanc comme un linge, nu et sans un poil sur le corps. Il tente à chaque fois de grimper sur mon dos, tel le Vieil Homme de la Mer de Sinbad. Cette agression me plonge dans un effroi indescriptible et je me débats longuement jusqu'à déloger mon parasite. Mais le vampire psychique ne se laisse pas abattre et revient à l'assaut, encore et encore. Â peine en suis-je venu à bout que la scène recommence depuis le début et ça tourne comme ça en boucle… Je finis pourtant par le chasser pour de bon, juste avant de me réveiller vraiment. Je me sens davantage épuisé par cette lutte que par mes cinq jours de voyage ininterrompu. Mais par ma victoire, j'ai gagné le droit de séjourner ici. Plus jamais ce monstre (ni aucun autre) ne viendra m'importuner !

Photo : Dr. Ma Pingke


Je consigne mes rêves en terrasse d'un petit restaurant, au bord d'un canal, l'atmosphère est absolument délicieuse. J'ai fait deux autres rêves en plus de celui du fantôme. Le premier est sans conteste un rêve de voyage. J'étais à Oulan-Bator mais ici, Oulan-Bator était une petite ville perdue au milieu d'un désert rocailleux. Je ne sais plus très bien l'ordre des événements mais je consultais mon email et j'y trouvais plein de messages de gens que je ne connaissais pas. Il y avait aussi une fille blonde super mimi qui me courait après. Moi je n'en voulais pas à cause de ma princesse indienne, mais finalement on s'embrassait quand-même. Après ça on décidait avec Monica, Anke et Maurice d'aller faire un safari dans le désert, avec la voiture de Monica. Mais le départ était interminable, surtout à cause de moi qui faisais chier et qui oubliais tout le temps quelque chose. En plus, les autres avaient fait le plein de courses, et moi je n'amenais que du riz blanc, ce qui me valait quelques reproches. À un moment, je voulais aussi prendre ma voiture (moi qui n'ai pas le permis !) mais au téléphone, mon meilleur ami m'expliquait que sur les routes mongoles, les amortisseurs claqueraient. Finalement on partait et je demandai aux autres combien de temps ils comptaient passer dans le désert. On me répondit « dix à quinze jours », ce à quoi je rétorquai que « je resterai quelques jours avec vous, puis irai seul de mon côté car je ne suis pas très sociable ». « On avait remarqué », m'envoya-t-on pour toute réponse. Bref, en partant on s'arrêtait je ne sais pourquoi en bas d'un immeuble, et je me rendais compte que ma princesse indienne habitait là. « Cool ! Je vais lui faire un coucou surprise, ça lui fera plaisir de me voir, elle qui ne m'attend que dans deux mois ! ». Alors je montais et on se retrouvait dans une effusion de joie. On discutait, et je lui avouais mon flirt avec la blonde, et elle me disait que ça n'était pas grave. Puis je lui demandais pour Seb (un vendeur de chemises, qui lui tournait autour et avec lequel elle envisageait vaguement de flirter avant mon départ), et elle me disait « Rien. On a dormi quelques fois ensemble mais il ne s'est rien passé ». Ensuite, comme les autres m'attendaient en bas, je partais. Mais une fois dans la voiture, je me prenais la tête avec Monica, Maurice et Anke et décidais de ne plus voyager avec eux. Je voulais de fait passer la nuit avec ma princesse indienne mais le rêve s'est arrêté là. Le second rêve, quant à lui, est plus concis : Oulan-Bator et Lyon s'étaient mélangées, et je tombais dans le Rhône (!) en cherchant un centre d'art qui m'avait été indiqué par un email d'Yve Bressande (!!!).

Je passe le reste de la journée à squatter les terrasses, goûtant les « saucisses de riz » végétariennes, buvant une bière au soleil (ça va avec les saucisses) et savourant la paix des lieux. J'essaie aussi de consulter mon email, mais il semble bel et bien que Thedawn.com ait mis la clé sous la porte sans daigner avertir ses utilisateurs ! Outré, je réactive ma vieille boite Yahoo et écris à ma tante, qui est la seule personne dont je connais l'adresse mail par cœur, pour lui demander de communiquer mes nouvelles coordonnées à la princesse indienne, qui elle-même fera suivre aux autres.


Prochaine expérience : The Lijiang Experience (Pt.2).

3 commentaires:

Priya Goel a dit…

Wonderful to read as always Shaomi.

Yve Bressande a dit…

? ? ?

Yve Bressande a dit…

J'ai fait ça moi, t'indiquer en rêve un centre d'art à Oulal anbateau ?... m'en souviens plus :)

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