24 août 2015

The China Experience – 14/ The Lijiang Experience (Pt. 3)

Premier voyage en Chine, septembre-novembre 2002.

Décollage ici.
Expérience précédente : The Lijiang Experience (Pt. 2).


07 octobre 2002 – 02 novembre 2002 : The Lijiang Experience, Lijiang (Yunnan).

Troisième jour. Je me lève tard, une habitude que je conserverai tout le long de mon séjour à Lijiang (tout au long de ma vie à vrai dire) et comme j'attends mon petit déjeuner en terrasse, je me trouve à côté d'un magasin de cloches (il en faut). Le tenancier s'obstine sans faiblir à en faire sonner une, toutes les dix secondes. Je suis sûr qu'il y a des gens que ça fatiguerait mais pas moi. Déjà, je me demande combien de temps je vais rester à Lijiang, car cette ville incarne une sorte d'idéal. Je trouve ensuite un email plein de tendresse de ma princesse indienne, qui s'inquiétait en effet de mon long silence.

J'enchaîne ballades et terrasses, songeant au parcours qui m'a conduit de l'Inde à la Chine, de la jeune fille aux yeux de miel à la princesse indienne. Que s'était-il passé après l'Inde ? Après tout ce qui avait précédé ce premier voyage, l'hystérique année 2000, tout cet extrême ? Il m'avait fallu une bonne semaine pour retrouver mes repères au retour d'Inde, puis peu à peu une sorte de vide s'était installé. La Casa Okupada fermée par ses propriétaires et leur huissier. Mon collectif, Neweden, au point mort depuis que j'avais cessé de m'en occuper. La fille aux yeux de miel définitivement hors de portée après le marasme d'Om Beach. Mon appartement débordant des merdes innombrables que m'avait légué ma mère, une vie entière à trier. Tout devint, soudainement, calme. L'extrême disparut, par surprise. Peut-être était-il simplement impossible de surpasser l'intensité des douze mois qui venaient de s'écouler, avec l'expérience indienne en point d'orgue. Je m'attendais à ce tout cela change ma vie à jamais, à ce que rien ne soit plus jamais comme avant. En effet, je n'étais plus comme avant mais le monde autour de moi, lui, était resté le même. Je pensais que ma vie changerait si je changeais, sans réaliser qu'il me faudrait d'abord la changer à la lumière de mon changement intérieur. Il ne me fallut pas un mois pour craquer : paniqué face au vide, j'invitai les survivants de Neweden à une grande réunion, pour relancer le collectif, organiser un nouveau festival. Je n'avais qu'un mot à dire. J'aurais voulu que cela vienne de quelqu'un d'autre mais ils attendaient tous que cela vienne de moi. Il fut convenu d'organiser un festoche d'un week-end, fin juin. L'histoire du Neweden Week-End est une autre histoire, pour un autre jour, il y eut de belles choses mais ce fut compliqué et j'en ressortis un peu écœuré, plus que jamais convaincu du peu d'intérêt d'un collectif qui n'existait qu'à travers moi. L'été arriva finalement, et je ne savais toujours pas dans quelle direction projeter mon existence.

Photo : Dr. Ma Pingke
Retour au présent. La nuit tombée, je retourne à la guesthouse prendre un pull, ce qui me vaut d'assister à une scène surréaliste. Dans la cour de la maison, une vieille femme entièrement nue est en train de hurler des insanités à ma famille d'accueil. Dans quelle démence ils sont tous plongés, je l'ignorerai à jamais. Après quoi je vais me détendre au Mishi-Mishi, café d'allure branchée qui me rappelle le très très branché Mushi Mushi de Lyon et ses délicieux apéros de fins de semaines (R.I.P.). Là, puis au Well's Café, je travaille au scénario du premier album d'Épeira, un personnage de BD créé par mon ami El Jice, dont j'avais déjà repris les aventures dans mon fanzine Légendes (le projet traînera et sera développé – mais jamais soumis aux éditeurs – avec deux dessinateurs successifs, avant que je ne me décide à le mettre au placard en 2005). Le disquaire en face du Well's, comme des tas d'autres ici, vend des contrefaçons très bien faites de CD occidentaux, qu'il diffuse à pleins tubes, enchaînant sans scrupule ragas indiens et tubes de Bob Marley (ce dernier est diffusé un peu partout à Lijiang). Á la table d'à côté, un Anglais et une Chinoise, du genre rencontre de voyage. La Chinoise tire une tronche de six pieds de long, son compagnon tente vainement de lui arracher un sourire. C'est pathétique ce qu'un homme est capable d'endurer pour pouvoir tirer son coup... De mon côté, je me sens malade et toujours épuisé.


Prochaine expérience : The Lijiang Experience (Pt. 4).

1 commentaire:

Victoria Sun-Mee Aulas a dit…

Charmante ville en effet, enfin, la partie ancienne bien sûr. Même s'il y a beaucoup de monde (mais bon, de toute façon c'est la Chine...), il y a toujours moyen d'éviter la foule.

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